Fin juillet nous étions une quinzaine de cyclos réunis pour gravir les plus grands cols italiens:stelvio,gavia et mortirolo.
Tout s'est bien passé sauf pour notre doyen robert 81ans ! qui nous fait un cr de ses mésaventures:
Au retour de la tant attendue rencontre, je fais part de mon vécu ... personnel.
Avant de passer à ce qui a été pour moi une sorte d'adieu aux armes (Hémingway me pardonnera de le plagier ici) ...
Je veux d'abord parler de ce qui a été positif :
- Cette région alpine d'abord, entre Livigno, Bormio, Stelvio, Gavia et Mortirolo, aux frontières de l'Italie, de la Suisse et de l'Autriche, qui est littéralement magnifique et mérite un détour, un séjour, et pourquoi pas, un retour.
- La météo ensuite, globalement très favorable, avec des températures "vivables" et beaucoup moins caniculaires que celles qui ont sévi sur notre région pendant ce court laps de temps.
- Enfin et surtout l'excellente ambiance d'amitié dans ce groupe, très hétéroclite par ailleurs, que Jean-Michel a fédéré pour ce séjour. J'en étais le doyen, sans conteste, c'est devenu pour moi une habitude. Si j'excepte mon ami Phiphi, tous sont de la génération de mes enfants, voire de mes petits enfants ! Mais j'apprécie hautement ce mélange de générations et cette agréable mixité.
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Ce premier jour de réjouissances, notre G.O. (Jean-Michel) a prévu la montée du col de Gavia.
Et moi, je me suis fait une philosophie dont j'ai informé le groupe. J'ai eu toutes les peines du monde à éconduire Lolo, qui, en bon samaritain voulait m'accompagner un temps ... Je ne veux ralentir personne et rouler seul, comme j'en ai désormais l'habitude. Je vais donc, sur la première partie du parcours , descendante ou plane, flâner en queue de peloton avec Lolo, pour lâcher et faire seul la montée, tranquillement, à ma main. Je ne suis d'ailleurs pas en bonne forme : Je viens de me rétablir après une bonne crise d'arthrose, j'ai dormi très moyennement et j'ai, pour parachever la tableau, des ennuis intestinaux.
Me voilà dans les premières rampes, un peu poussif, mais les jambes tournent et les kilomètres passent.
J'arrive à la station de sports d'hiver de Santa Catharina, km 25, altitude 1750 m. La traversée du village est plane. Pour changer d'allure, je passe sur le grand plateau ; mais le répit est court et voilà la route qui se cabre méchamment aux dernières maisons du village ...
Et j'ai complètement oublié que je suis sur la plaque.
Je monte sur le grand pignon. Mon pédalier et ma roue se bloquent. Je déchausse rapidement pour constater que plus rien ne tourne et que ma chaîne est tendue comme la corde d'un arc alors que mon dérailleur est dans une position horizontale.
Les mains pleines de cambouis, je parviens à sortir ma roue.
Le problème survient, quand je m'avise de la remettre en place : Plus moyen de la centrer. Le pneu touche le cadre.
Il n'est donc plus question de continuer. Je vais essayer de rentrer. Il me reste 25 km et dans ma tête je me refais le parcours : 15 km de descente et 10 km de montée, légère d'abord puis à 6/8%.
Ca promet.
La descente d'abord où mon seul souci est de ne pas prendre de vitesse. Plus moyen de changer de pignon. Quand je tente de le faire, la chaîne commence à riper sans accrocher les dentures. Et j'ai peur ... Je m'arrête, tente de recentrer ma roue en vain. Elle frotte le cadre et le pneu chauffe.
Ouf ! Voilà Bormio. Plus que dix km mais quels kilomètres ! Un freinage permanent, un soleil au zénith, un air à plus de 30°, une circulation automobile intense ... et la trouille au ventre que ma bécane me laisse tomber, définitivement.
Il me reste cinq kilomètres à 6/8%. Mes jambes se tétanisent, je suis en nage.
Je pense que jamais de ma vie de cycliste je n'ai été dans un tel état.
Re ouf ! Voilà à ma vue le clocher de l'église qui voisine l'hôtel. Je suis littéralement exténué. Je n'ai plus pensé ni à m'alimenter, ni à boire.
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Vélo posé, douché, je bois au robinet du lavabo de la chambre avec l'avidité de celui qui a traversé le désert du Sahara.
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Je m'étends sur le lit.
Tout à l'heure, quand Phiphi sera rentré, je lui raconterai mes ennuis. Féru de mécanique cycliste, il va guérir mon pauvre vélo !
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On frappe à la porte de la chambre, c'est Phiphi.
Après mon récit, il me dit :
-Ben, on va voir ça. Et demain, nous grimpons le Stelvio ensemble ...
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Au local à vélo, point ne sera besoin d'outils !
Constat : la traction sur la chaîne a plié les bases de mon cadre. Ma très chère bécane, celle que j'aimais tant, est morte, définitivement, sur les pentes du Gavia. "De profundis" ... Me voilà veuf et devenu malgré moi un piéton, promis à l'errance dans les arcanes compliquées de l'hôtel !
J'aurais pu louer un vélo, c'est vrai, et continuer mon séjour cycliste ; vu l'environnement de chance qui est mien en ce moment, j'ai renoncé de peur d'un pépin plus grave.
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Et grâce à Phiphi dont je loue ici la vraie amitié, je verrai le Gavia et le Stelvio ... en automobile ! Merci l'ami Phiphi.
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Je reprends le couplet d'une chanson de Gilbert Bécaud :
ET MAINTENANT, QUE VAIS-JE FAIRE ...
Je crains que cet épisode ait mis un terme à ma carrière cycliste, pour un temps du moins.
Rassurez vous robert a repris le vélo et son cher "ghisallo" est en réparation